Petit chelem à Pin's Land (2009)

Après quelques semaines à observer les potos soulever de multiples beaux poissons un petit peu partout en France, mon tour était enfin arrivé d’aller au bord de l’eau. Christophe revient à peine de 8 nuits sur un grand lac de l'Est, et a mis au sec trois poissons sympas. 3 jours après, il est prêt, les sacs sont bouclés, et après un trajet en voiture dont je ne voyais plus la fin, nous nous retrouvons à l’une des mises à l’eau de ce même lac en ce jeudi matin.

Il est 6h30. Après avoir gonflé mes deux pneus, nous répartissons nos affaires sur nos bateaux. Et nous nous pressons. Parce que l’arrivée des orages et de fortes pluies est attendue dans la matinée. Après avoir longuement navigué, nous nous installons dans une petite baie. Une heure plus tard, nos cannes sont tendues. Il était temps, les orages grondent au loin, et le vent souffle de plus en plus fort. Ils seront bientôt sur nous…

Dans les minutes suivantes, de grosses gouttes commencent à s’écraser sur nos abris. Direction l’intérieur de la forêt, et on monte un parapluie au dessus de mon annexe. Il est 10h du matin. Après une pleine journée de pluie, celle-ci stoppe son offensive vers 18h30. Mais notre répit sera de courte durée. Alors que le soleil vient de faire son apparition, un autre orage gronde au loin.

De multiples trouées ont été amorcées dans tout notre secteur, et même si pour la première fois depuis quelques temps nous n’avons vu aucun poisson sur les bordures, nous sommes confiants. Au téléphone avec Renaud qui m’explique les méthodes de pêche bourrin des Ouestois - bah oui, on est quand même bien plus techniques dans le Berry !!! - , une des cannes émet un bip… La tresse se tend doucement, je raccroche et ferre. Christophe qui a prit un beau poisson trois jours plus tôt me propose de gérer celui-ci. Après avoir parcouru 50m en annexe, j’ai la sensation d’avoir décroché. Merde… Mais vu la densité des herbiers, nous ne pouvons ramener le montage. Alors que nous sommes quasi à l’aplomb de ce dernier, contact !!! Une forme passe devant nous, grise et noire… Un glane… Merde merde et remerde… C’est bien ma veine… Le montage est remis en place, et nous retournons à notre bord.

L’orage passe sur la pointe devant nous, et il est enfin temps de rejoindre mon lieu de villégiature. Il est 21h, et mes yeux se ferment lentement mais surement. Première nuit de session, tous les espoirs sont permis…

Bip. J’ouvre les yeux. Il fait encore nuit noire. Probablement rien.

D’un coup, c’est une grosse tirée, malgré mon frein serré… Je ferre, le poisson n’est pas tanké. Je le pompe sur une grosse dizaine de mètres, saute dans mon annexe, et file à sa rencontre. Le poisson est en surface, et à mon arrivée, plonge au fond dans les herbiers. Je l’aperçois à la lueur de ma frontale. Le dos est large, très large…ça c’est bon !!! La croyant bloquée dans l’herbe, j’accentue légèrement la pression, le poisson démarre d’un coup et le frein couine. Elle explose en surface, et se fait cueillir dans l’épuisette au premier passage. Christophe qui suit mes mouvements depuis dix minutes attend patiemment. Je la pose dans le tapis et le rejoins. Première nuit, ma pêche est faite… J’en reviens pas. Je ne redormirais pas de la nuit…
Au petit jour, nous avons la visite de Fred et de son collègue, qui vienne pour la journée se balader avec une batterie chargée au taquet… Je crois qu’ils font les même pour homme…
 

Il fait beau, et avant de découvrir tous les quatre ce qui nage dans le sac noir, on se boit une bonne bière brassée en Picardie qu’ils nous ont emmené. Puis les paparazzis prennent place.

Je savoure ce moment là et barbote de longues minutes avec le poisson… Néanmoins, notre joie est vite rafraichie, au contraire de la température extérieure qui elle grimpe en flèche, car aucune de nos trouées amorcées n’a été visitée… De plus, après avoir pris contact avec Lionel (Lutjan) et quelques autres connaissances qui pêchent elles aussi sur le lac, il s’avère que nous sommes plus d’une dizaine à opérer en bateau, en plus des secteurs de nuit qui sont blindés. Beaucoup trop de monde à notre gout… Dans le milieu de l’après midi, Christophe part se balader. Moins d’une heure après, on remonte les amarres, fishs repérés !!! Le moral au taquet, on s’installe prêt d’elles, et on se dépêche de tendre.
Mais la nuit se passe calmement, trop calmement.

Après une longue discussion, notre décision est prise. Il y a trop de monde sur le lac. Nous faisons face à deux problèmes, à savoir le risque accru de voir la garderie se pointer, car des potes nous font part d’un gros mécontentement des carnassman depuis deux jours. Certains pseudos carpistes pêchant du bord tendent à plus de 700m dans les frayères, et les « carpes boat » sont vraiment nombreux. De plus, et c’est la raison principale de notre départ, il nous est quasiment impossible d’amorcer des secteurs à l’avance, sans risquer de voir quelqu’un dessus le lendemain. Bref, une dernière photo, et on retourne à la mise à l’eau.

Après deux nuits, commence la deuxième étape de notre session, on file à quelques kilomètres au nord-est d’ici, sur un autre lac. Des potos viennent pourtant de s’y casser les dents plus de dix jours, mais bon, qui ne risque rien n’a rien. Et puis Christophe y habite et connait donc un peu les lieux…
Nous mettons à l’eau par de grosses chaleurs, et à peine à 50m des voitures, nous faisons fuir une carpe qui stationnait en surface en pleine eau. C’est parti pour une séance de repérage. Mais après plus de deux heures de navigation moteur à fond, nous n’avons vu que quelques silures brèmes et tanches… Pas la queue d’une…
Mais la motivation est à 100%, et après avoir repéré de belles trouées dans une baie, nous filons dans une autre. Ou plutôt à l’extrémité d’une autre, parce qu’ici, les herbiers sont denses, très denses… Et les trouées rares, très rares…
A la tombée de la nuit, les cannes sont tendues. Christophe a réussi à repérer une miroir, et a mis son montage dans une trouée proche. Nous pêchons à présent du bord, les bordures étant bien plus hospitalières. Mais là, un nouveau souci se pose à nous, la contre attaque des moustiques… C’en est blindé…
Après cette journée, on est claqué, et on file se coucher…
4h du matin, une grosse tirée suivie d’un départ franc. Christophe prend contact, et on part dans la nuit vers ce que l’on soupçonne fortement être un glane… Celui-ci nous gratifie d’un beau rush à notre approche, et au premier passage dans la frontale, ben perdu, c’est une miroir… Pas un monstre, mais elle nous fait un combat sympa.
Ben voilà, on a chacun notre poisson, on n’est pas venu pour rien…
Au petit jour, encore une fois, nous discutons de notre départ ou pas du poste. Sachant que la prise a eu lieu sur une canne tendue à perpète, et qu’aucune de nos trouées de bordure n’a été visité, on décide de bouger à nouveau. Mais avant de bouger, séance photo…plutôt agitée…

Mon appareil photo est trempé. Heureusement, c’est un Canon, nul doute qu’un Nikon aurait rendu l’âme avec ce traitement…
Nous repassons la matinée en bateau à chercher d’éventuelles carpes, mais rien, nada…
Pis enfin, deux poissons sont repérés… Nous amorçons les quelques trouées présentent, et filons sur la pointe. Et dans la baie suivante, quelques trouées énormes, et surtout, impossible d’observer le fond dans moins de deux mètres d’eau…des nuages de particules en suspension… ça pue le poisson par ici… Et pour couronner le tout, on a un poste cinq étoiles dans la forêt proche, très ombragé, car en ce dimanche après midi, la température à l’ombre a depuis longtemps passé les 30 degrés. Une vraie fournaise. Les cannes tendues et les trouées amorcées, nous comatons l’après midi complète sous cette chaleur étouffante. Puis enfin, la nuit arrive, avec ses espoirs et ses moustiques… Heureusement, 5/5 est là et veille sur nous…

Même si nous sommes confiants, on reste prévoyants. Nous envisageons toutes les possibilités, du fait de rester ici (si ça touche dans la nuit), au changement de poste (si ça touche pas mais que d’autres trouées ont été ramassées sur les baies précédentes), au changement de lac encore une fois…Vu qu’on n’a pas vu un poisson ici sur des kilomètres de berges et des kilomètres, on ne risquera pas grand-chose…
Encore une fois, force est de constater qu’au matin, pas un poisson n’a montré le bout de son nez. Christophe part à travers bois afin de retourner chez lui car il a rendez-vous avec sa femme ce matin pour une dernière échographie…
Ça c’est bon !!! Vers 9h, avant le grand cagna, je replis les huit cannes, je range tout le matos et prend l’eau. Pas une bouillette ne manque nulle part… Pas une seule trouée de visitée… Bon, direction la mise à l’eau. Les polarisantes me permettent de voir un sacré tas de brèmes et tanches, et à quelques centaines de mètres de la voiture, je repère une quinzaine de carpes, dont au moins deux tournent aux alentours des 15kg, et au moins dix sont sous la barre des 7/8kg… Rien de bien bandant, mais je repère quelques trouées… Peut-être que si on revient… Au rythme ou on y va, rien est impossible… Mais là, pour l’instant, je crame, il fait chaud, et je suis obligé d’attendre mon nain jusqu’à au moins 13h… Une fois la bordure ralliée, la voiture chargée et les deux bateaux sur la remorque, je file piquer une tête… Quarante minutes de baignade, ça fait un bien fou. Vers 13h20, Christophe arrive. On décole, mais juste avant, on se commande deux pizzas au port du coin… Qu’on mangera au bord de l’eau, mais à l’ombre. Il fait encore plus chaud qu’hier… Un coup de fil à ma femme, et elle m’apprend que nous sommes en zone orange pour les orages la nuit prochaine. Mais cette dernière est loin d’être là et pour l’heure, il fait encore bien jour. On attendra 18h avant de sortir les cannes et le pneu. Puis la routine habituelle commence. On prospecte, on voit rien, on tend les cannes sur des trouées qui ont l’air d’avoir été visité récemment, puis on accueille deux potes pour une soirée raviolis… L’horizon se charge petit à petit, et un air très frais fait place à la chaleur. Ça sent pas bon ça… Vers 22h, direction le bed. Alors que je lis tranquillement, l’intérieur de mon abri pali de temps à autre. Je sors, et regarde dans la direction des autres lacs… Le ciel est illuminé toutes les secondes par de multiples éclairs, un spectacle pyrotechnique magnifique vu d’ici, mais j’espère pour Lionel et Olivier qu’ils sont à l’abri pour cette nuit. Le vent se lève, de plus en plus puissant, et rapidement, la tempête est là et se déchaine. Nous avons le vent pleine face. Je ne suis vraiment pas rassuré pour les collègues, et vers 1h du mat’, j’envoie un sms pour voir s’ils vont bien. A priori oui, ils vont bien, mais sont sous la tempête aussi…
Au jour, nous n’avons pas subi les orages, juste du vent, beaucoup de vent. Ma première pensée va pour les pêcheurs en boat, j’espère qu’il n’est arrivé aucun malheur, car si Lionel et Olivier sont équipés comme il faut pour pêcher depuis leur embarcation, certains des bateaux croisés n’avaient rien à faire sur l'eau… Une carpe ne vaut pas que l’on risque sa vie pour elle !!!
Chez nous, les cannes sont en vrac, j’enfile mes waders et part m’occuper de tout ça. Des kilos d’herbes stationnent sur les moulinets et dans les fils, mais les plombs n’ont pas l’air d’avoir bougé. On avait prévu du lourd… Je dois quand même replanter certains piques qui se sont affaissés sous les coups de boutoirs des vagues. Les cannes en tresse, elles, passent leur temps à sonner. Les roseaux prennent appuis dessus, et cela a duré toute la nuit. Les piles, à ce rythme, seront bientôt déchargées. Mais malgré cette météo dantesque, nous n’avons toujours pas revu la queue d’un poisson… Dur dur d’être un pêchaillon…

9h45, 4 bips espacés mais bien trop réguliers pour que ce soit le vent… J’enfile mes waders à nouveau, et le départ est franc. Temps d’arriver aux cannes, elle s’est arrêtée. Je saisi l’épuisette, elle repart. Je lance l’épuisette dans les vagues devant moi et ferre. Une queue claque en surface à 30m de moi. Elle est là, et emmanche les herbiers en travers. Vu qu’on a fondu le moteur hier soir, hors de question que je parte la chercher en bateau. Je la pompe alors en force, et elle vient en surface. Des fagots d’herbe remontent le long de la tresse, et se bloquent dans le scion. Je risque de devoir ouvrir le pick up pour pouvoir défaire tout ça… Mais quelques coups de queue plus tard, je la glisse dans le filet. Et là, j’admire, j’admire ce que la nature est capable de créer… Un long, un très long poisson - cuir de 116cm - qui doit largement passer le poids de la première… Jackpot, je suis sur un nuage. J’appelle Christophe, lui dit de se magner, y’a des photos à faire !!! BANZAÏ !!!

Je suis verni !!! Un vrai bijou. Entre temps, après bien des recherches, Olivier a retrouvé son annexe qui avait disparue dans la nuit dans la tempête. Je lui avais pourtant dit de ne pas l’attacher avec du fil soluble… Une bonne nouvelle ne venant jamais seule, je montre à Christophe comment réparer un moteur électrique (c’était le sélecteur de vitesse qui avait grillé), et zou, on retend tout.

L’après midi, une petite sieste s’impose. La pluie est toujours là, et lorsque je me lève, j’observe un phénomène étrange… Git sur notre table un portable, comment dire, en au moins cinq morceaux… Christophe ??? Réponse : « Y voulait pas capter ce con !!! »

Plus rien ne se passe, si ce n’est le vent qui continue à battre la berge. Le lendemain, le constat est sans appel… j’ai eu un sacré coup de chatte… Parce que niveau poisson, c’est le désert ici… 48h pour une touche…

Que fait-on ??? On reste !!! Ce jour est l’anniversaire de Pin’sette, la femme de mon nain. Au programme de la journée : viande et pétillant !!! Et surtout, aujourd’hui, c’est le retour du soleil !!!

Bref, on reste donc une nuit de plus, mais pour ne pas changer, au petit jour, nada… Notre matos est donc vite plié. Direction le lac précédent. Nous avons pris un poisson sur le premier, un sur le deuxième et un sur le troisième, mais ce que l’on voudrait, c’est capturer un beau poisson sur le deuxième, histoire de faire un grand chelem… Après la visite de nos anciennes trouées, le constat est simple, y reste beaucoup de came au fond… Après 3h de navigation, le doute est là… Pas une dorsale, et même les tanches et brèmes si nombreuses quatre jours plus tôt ont déserté les berges… Il est 16h30, nous avons encore du temps devant nous. Nous retournons à la mise à l’eau, et retournons nous balader sur l'eau que nous avions quitté le matin même. Après avoir parcouru quelques centaines de mètres, nous croisons Julien (Carptrotter) et sa femme, en train de tester leur nouvel achat. Après quelques minutes de discussions, on s’arrime, et en avant pour une visite guidée des baies !!! Grosse économie de batterie en perspective !!!

Après une bonne heure de prospection, rien à faire, les poissons en bordures, c’est de l’histoire ancienne… Bref, on amorce une roselière gigantesque, et on s’installe à l’extrémité de celle-ci. On s’octroie une petite pose, et on a une petite pensée pour les potos !!!

Après une nouvelle nuit trop calme, nous devons prendre une décision très importante : que faire de nos dernières 24h ??? La réponse est vite trouvée : on trace la route, histoire de payer un coup à boire aux beaux gosses d’Alliance qui sont en masse sur notre première destination !!! A 13h, c’est chose faite !!!

Après avoir longuement parler sous le soleil, on entreprend de traverser le lac, direction une grande pointe. Mais le vent souffle, et la traversée n’est pas de tout repos. Une bonne heure de navigation plus tard, on arrive enfin à destination. Un dilemme se pose à nous… Ou s’installer ???
 

Ben finalement, après avoir fait le tour de la pointe, on s’installera ici !!!

Mais pour notre dernière nuit, pour finir en beauté, on ne reverra rien. Notre session se termine sur deux notes positives malgré tout, la rencontre d’une paire d’acharnés, et la prise d’une carpe sur chacun des trois lacs visités.
Ah si, j’allais oublier, deux dernières choses…les moustiques…c’est vraiment dingue, jamais vu ça ailleurs…
Et enfin, le dernier soir, la nature nous a dit au revoir à sa manière… la plus belle de toute…

Anthony pour Alliancepeche.net - 2009